Part 4 – La reconnaissance du Hip Hop (4/5)
A la fin des années 70, le Hip Hop a défini ses codes et devient une musique reconnue et reconnaissable avec sa propre musicalité et sa propre culture, le genre a gagné la rue, les discothèques, et l’esprit des auditeurs, mais n’a pas encore conquis la radio et les disquaires.
L’importance de la maison de disque Sugar Hill Records dans cette entreprise est sans précédent. Le label est fondé en 1979 par les époux Robinson, Joe et Sylvia. Si son succès a été relativement court, il ferme en effet ses portes dès 1986, il sera un berceau pour le développement d’artistes, l’enregistrement de singles et albums et pour la commercialisation du Hip Hop.
Sugar Hill : le label qui a tout changé
Sugar Hill est effet le premier label, bien qu’indépendant, à signer des artistes Hip Hop tout en se spécialisant dans le genre, il y avait quelques artistes Funk ou Jazz mais ce n’est qu’une petite partie du catalogue. Le roster compte parmi les plus grands rappeurs de la période et considéré comme des légendes du rap Old School, bien que beaucoup d’entre eux soient oubliés ou méconnus aujourd’hui. Les plus notables sont les Treacherous Three avec Kool Moe Dee, Spoonie Gee, L.A. Sunshine et Special K, les Funky 4 +1, The Sequence, Sugar Hill Gang, Crash Crew, West Street Mob ou encore Grandmaster Flash and the Furious Five.



Le label a sorti pas loin de 40 albums et compilations entre 1980 et 1985, dont une trentaine de Hip Hop, sans compté les multiples singles. Remis dans le contexte de l’époque et pour un label indépendant, c’est énorme. A titre de comparaison, Death Row n’a sorti que 19 albums et compilations pendant sa période de gloire de 1992 à 1998.
L’arrivée du Hip Hop à la radio
Le label peut aussi se vanter d’avoir sorti le premier enregistrement Hip Hop, en 1979, qui n’est autre que Rapper’s Delight de Sugar Hill Gang, dont les paroles auraient d’ailleurs été écrites par Grandmaster Caz des Cold Crush Brothers. Le single est un succès mondial, il enregistre plus de 5 millions dans le monde, dont 1,3 million aux États-Unis. Mais ce n’est que le début puisque la maison de disque enchaine rapidement avec une multitude d’albums et de singles, dont certains sont de véritables succès, d’autres beaucoup moins.
Dans cette lancée, le label enregistre et commercialise un grand nombre de single entre 1979 et 1980, dont Rappin & Rocking The House et That’s The Joint de Funky 4 + 1, Monster Jam et Spoonie Is Back de Spoonie G, At The Party de Treacherous Three ou encore Funk You Up de The Sequence.
Ces singles permettent à tout ce beau monde de sortir des albums. Les albums s’enchainent sur un laps de temps relativement court. Si les styles sont relativement similaires avec un Hip Hop teinté de Funk et des influences Disco, notamment l’album éponyme de Sugar Hill Gang ou Sugarhill Presents the Sequence, tous les deux sortis en 1980, certains se démarqueront avec des styles plus distinctifs.
Les premières diversifications
Avec la multiplication des sorties, les groupes vont devoir commencer à se différencier de leurs concurrents. West Street Mob aura un style beaucoup plus électronique, un peu Electro-Funky, influencé par Afrika Bambaataa, avec leurs deux albums, l’éponyme de 1981 et Break Dance – Electric Boogie de 1983.
Kool Moe Dee, membre des Treacherous Three aux côtés de L.A. Sunshine et Special K, aura quant-à-lui un style précurseur du New Jack Swing bien que son premier album solo arrive seulement en 1986 et ne sortira pas sur Sugar Hill. Malgré tout, les albums des Treacherous Three sortiront bien sur Sugar Hill, et ce dès 1984 avec Whip It.


De son côté, Spoonie G, qui a quitté les Treacherous Three très rapidement pour une carrière solo tout en restant un membre affilié, sera une grosse influence pour le Gangsta Rap et est considéré comme l’un des tout premiers à avoir fait émerger le style. Comme Kool Moe Dee, son premier album arrive beaucoup plus tard, en 1987 et ne sort pas sur Sugar Hill puisqu’il quitte la maison dès 1983. Seuls des singles, avec ou sans les Threacherous Three, sortiront de Sugar Hill.
Grandmaster Flash and The Furious Five ont également rejoint l’aventure Sugar Hill avec un premier single, Freedom, en 1980 et bien d’autres singles à succès avant de sortir l’un des albums les marquants et reconnus du Hip Hop Old School, The Message, en 1982, considéré comme le premier enregistrement de Hip Hop conscient. Quelques autres albums suivront sur les années avec parfois Melle Mel en tête d’affiche, qui valent aussi l’écoute même si moins marquants.


En dehors de Sugar Hill, quelques autres rappeurs parviennent à signer des contrats avec des maisons de disque, le plus connu étant Kurtis Blow, premier artiste à avoir décroché un contrat avec une major, Mercury, en 1979 et un premier album en 1980.
L’arrivée du Hip Hop sur les écrans
Le développement du Hip Hop continue son chemin vers les écrans, un autre média très important pour la reconnaissance du genre auprès du grand public. En 1983, le film Wild Style, dirigé et produit par Charlie Ahearn, considéré comme le tout premier film Hip Hop. Il s’agit d’une vitrine exceptionnelle pour la diffusion de la culture Hip Hop puisque le film est diffusé dans un théâtre de Broadway et dans bien d’autres villes des États-Unis.

Au-delà de diffuser la culture Hip Hop, le film permet aussi de mettre à la vue de tous le mode de vie dans les quartiers de New York, puisqu’il met en scène un adolescent graffeur du Bronx. Tous les éléments de la culture Hip Hop sont repris, le grafitti étant le thème central et l’activité du personnage principal, mais on retrouve également le rap, le DJing ainsi que le break-dance.
Le film est sans surprise accompagné d’une bande son Hip Hop, également la première de l’histoire et parmi les albums les plus emblématiques du rap Old School avec notamment les plus grands noms de la période, Grandmaster Caz, Double Trouble, duo issu des Funky 4+1, les Cold Crush Brothers ou encore Grand Wizard Theodore and The Fantastic Five sous le nom de Fantastic Freaks.
Par Grégoire Zasa
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