De la rue jusqu’au radio, la naissance d’une culture musicale
Part 1 – Les premières block-parties (1/5)
Le Hip Hop fête bientôt ses 50 ans avec pour date de naissance symbolique le 11 aout 1973, reconnue comme la première soirée Hip Hop animée par DJ Kool Herc dans le Bronx. Symbolique parce que cette simple date ne pourrait suffire à résumer la naissance, et encore moins la construction, du Hip Hop. Un mouvement ne se crée pas en une simple soirée, mais par une succession de facteurs, d’évènements et surtout d’acteurs qui ont porté et développé le mouvement pour en faire ce qu’il est aujourd’hui. Je ne remets pas en cause l’action de Kool Herc pour la naissance du mouvement, bien loin de là, mais quelques autres avaient déjà lancé quelques ébauches de ce qui deviendra le Hip Hop, et bien d’autres l’ont suivi.
On retient généralement quelques noms considérés comme les pionniers du Hip Hop, mais qui sont-ils vraiment ? Qu’ont-ils apporté pour insuffler un mouvement qui perdure, sous diverse formes parfois éloignées de son origine, encore aujourd’hui ? Le Hip Hop porte-t-il toujours les mêmes valeurs ?
La première soirée Hip Hop
Avant d’arrivée dans les discothèques, le Hip Hop a vu ses débuts dans la rue, dans les fameuses block-parties dont l’une des premières a été organisée par DJ Kool Herc avec sa sœur dans le simple but de faire de l’argent. La première block-party où le Hip Hop est né aurait été produite au 1520 Sedgwick Avenue le 11 aout 1973.
Plutôt que de simplement jouer les vinyles de Funk et Disco comme c’était le cas à l’époque dans les discothèques afro-américaines de New York, Herc reprend une partie du beat pour créer une boucle qui se répète indéfiniment pour créer un rythme continu, appelé le break, à l’aide d’une double platine vinyle. Les premières techniques de DJing étaient inventées, et par la même occasion on retrouve les premières traces de ce qui deviendra le sampling dans le Hip Hop. En plus du DJing, Kool Herc avait l’habitude de motiver la foule avec des annonces rythmées, ce qui a contribué à créer l’une des premières formes de rap. La foule dansante a quant-à-elle initié les premiers pas de break dance avec l’apparition des B-Boy.



Aux côtés de DJ Kool Herc, un dénommé Coke La Rock, accompagné des Herculoids, anime l’audience avec des shout-outs à destination d’amis avant que ses animations ne deviennent progressivement au fil des soirées des rimes en y ajoutant de la poésie. En réalité, personne ne savait réellement qui était Coke La Rock, qui se faisait appelé par bien d’autres pseudos, Nasty Coke ou A-1 Coke, avant qu’il devienne reconnu du public comme un animateur. La notion de MC, le maitre de cérémonie dans sa définition la plus pure, venait de naître sans que personne ne le remarque.
Les précurseurs du Hip Hop
Si la soirée de Kool Herc au 1520 Sedgwick Avenue le 11 aout 1973 est considéré comme le point de départ et la naissance du Hip Hop, après tout il faut bien retenir une date, en réalité, d’autres artistes avaient déjà initiés les prémisses d’une nouvelle musique, d’un nouveau genre naissant, sans pour autant être véritablement du rap ou considéré comme culturellement Hip Hop.


Des artistes tels que The Last Poets ou Gill Scott-Eron ont aidé au développement du Hip Hop, à la fois dans la musicalité mais aussi dans la philosophie de la culture. Le premier est évidemment le spoken-word, et le deuxième n’est autre qu’une poésie politique dénonciatrice que ces artistes ont initié. Si le Hip Hop ne nait pas directement sous l’impulsion des deux artistes susmentionnés, ils ont influencés indéniablement le genre. Le spoken-word est ni plus ni moins qu’un précurseur du rap, ce n’est pas du chant et ce n’est pas encore du rap, mais il introduit la notion de poésie sur un rythme, qui sera ensuite reprise plus directement avec la naissance des techniques de R.A.P., Rythme And Poetry, un hybride entre le chant et le spoken-word, moins mélodieux que le premier mais plus rythmé et cadencé que le deuxième.
La poésie n’est pas directement issue de ces artistes puisque la musique de manière générale l’utilise, mais le contenu dénonciateur posera les fondations du Hip Hop, une musique politique avec un message social teintée d’un nationalisme identitaire noir américain et d’une volonté communautariste. Ce n’est pas le cas au début puisque le Hip Hop est à l’origine plutôt festif, on y reviendra plus tard, mais il deviendra très rapidement, peu après Kool Herc, politique et social. Et il est indéniable que les propos de Gill Scott-Eron et The Last Poets ont été des influences majeures, au même titre que le Funk de George Clinton, Sly Stone, James Brown ou Marvin Gaye des années 70.
Par Grégoire Zasa
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